L’Office national du film du Canada à Montréal ouvre les portes de ses archives
Des documents d’archives de soldats canadiens de la Première Guerre mondiale au film La vie heureuse de Léopold Z du cinéaste Gilles Carle, les salles de conservation de la collection de l’Office national du film du Canada (ONF) contiennent des fragments de l’histoire collective. Pour une toute première fois, l’édifice situé sur la rue Cousens, dans l’arrondissement montréalais de Saint-Laurent, a ouvert ses portes mardi aux représentants des médias.
L’air de cette matinée de fin octobre est frisquet, tout comme l’intérieur des salles de conservation de l’organisme, appelées les « voûtes ». La température de la pièce où trônent les étagères de 4,3 mètres de hauteur est effectuée à 12 °C, afin de préserver le matériel qui s’y trouve, explique Hocine Cherifi, superviseur de la conservation à l’ONF.
À eux seuls, ces lieux contiennent notamment les 14 000 œuvres du producteur et distributeur public, dont plus de 6000 sont accessibles gratuitement en ligne. « Les gens ne réalisent pas qu’une collection de films, ça existe aussi physiquement. Il faut la mettre quelque part et il faut la protéger », affirme Marc St-Pierre, conservateur de collection à l’ONF.
Cette presque quinzaine de milliers d’œuvres n’est cependant que la pointe de l’iceberg, renchérit Léa Nakonechny, agente des ventes pour Archives ONF. Selon elle, la métaphore est bien choisie en raison de la fraîcheur des salles, mais également parce que celles-ci abritent près de 80 000 plans d’archives. Ces dernières sont des scènes de tournage qui n’ont pas été utilisées dans un film, mais qui ont été sélectionnées pour être conservées pour leur valeur historique.
En tout, les salles de conservation et de numérisation, qui sont depuis 2019 sur la rue Cousens, dans Saint-Laurent, préservent environ 190 000 éléments cinématographiques, dont des bobines de film et des cassettes, en plus de photos et d’objets de collection. Le siège social, lui, se trouve depuis quatre ans à l’Îlot Balmoral, au coeur du Quartier des spectacles de Montréal. Fondé en 1939, l’ONF a d’abord été installé à Ottawa avant de déménager en 1956 sur le chemin de la Côte-de-Liesse, dans la métropole québécoise.
L’édifice visité mardi témoigne de l’histoire de l’Office national du film du Canada en exposant certains artefacts tirés d’œuvres marquantes. Parmi les objets, on trouve notamment des prix remportés par l’ONF au fil des ans, qui côtoient les dessins à l’encre de Chine de Michèle Cournoyer ayant servi pour son film sur l’inceste intitulé Le chapeau (1999).
Un « jardin » cinématographique
Si Hocine Cherifi qualifiait avant de « trésor » le matériel qui se trouve dans les salles de conservation, il s’est depuis ravi et le désigné comme un jardin entretenu par des experts. Mmoi Nakonechny compare d’ailleurs les plans d’archives de l’ONF aux fruits d’un pommier. « Ils servent à d’autres gens pour cuisiner leurs plats et nourrir d’autres productions. »
L’un des « jardiniers » rencontrés lors de la visite est Steven Woloshen, technicien en numérisation, conservation et laboratoire. Muni de gants blancs, il s’affairerait à préparer une pellicule de 35 mm avant qu’elle soit numérisée.
Les artisans de l’ONF prennent soin des œuvres, souligne Marc St-Pierre. « C’est quand même notre patrimoine », soutient-il.
Ce dernier a d’ailleurs du mal à choisir parmi les oeuvres de l’Office national du film du Canada celles qu’il considère comme les plus importantes. « C’est un peu comme demander à une mère quel est son enfant préféré », dit celui qui travaille à l’organisme depuis une vingtaine d’années.
« Je suis cependant extrêmement nostalgique d’époques que je n’ai pas connue, comme, par exemple, le Montréal des années 1950 et 1960. » Il mentionne le film La vie heureuse de Léopold Z (1965) de Gilles Carle, où l’on peut observer des images de lieux montréalais en noir et blanc. « Ça permet de voir à quel point la ville a changé aussi. »
Le « jardin » de l’ONF continue d’ailleurs de grossir, avec une quarantaine d’œuvres qui s’y ajoutent chaque année. « Ça complique un peu mon travail. Je suis toujours en train de me rattraper pour voir tout ça », lance-t-il, en riant.
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