Droits de l’homme en Russie : rapport d’expert du mécanisme de Moscou de l’OSCE, déclaration conjointe


Je prononce cette déclaration au nom des 38 États participants suivants qui ont invoqué le Mécanisme de Moscou (dimension humaine) le 28 juillet : Albanie, Andorre, Autriche, Belgique, Bulgarie, Canada, Croatie, République de Chypre, République tchèque, Danemark, Estonie , Finlande, France, Grèce, Islande, Irlande, Italie, Lettonie, Liechtenstein, Lituanie, Luxembourg, Malte, Monaco, Monténégro, Pays-Bas, Macédoine du Nord, Norvège, Pologne, Portugal, Roumanie, Slovaquie, Slovénie, Espagne, Suède, Suisse, Ukraine, Royaume-Uni et États-Unis.

Professeur Nußberger, au nom des États requérants, je tiens à vous remercier pour votre travail en tant que rapporteur dans le cadre du mécanisme de Moscou de l’OSCE. Nous vous sommes très reconnaissants de votre approche professionnelle et méticuleuse de votre mandat, de la méthodologie rigoureuse que vous avez appliquée et du rapport substantiel que vous avez produit. Votre intégrité et votre dévouement aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales sont évidents dans votre rapport. Nous espérons que les 57 États participants à l’OSCE rendront justice à votre rapport en examinant attentivement vos conclusions et recommandations, qui s’adressent non seulement à la Fédération de Russie mais aussi aux États participants de l’OSCE et à la communauté internationale au sens large.

Monsieur le Président, nous avons invoqué le mécanisme de Moscou parce que nous avons identifié la situation dans la Fédération de Russie comme une menace particulièrement grave pour le respect des dispositions de la dimension humaine de l’OSCE telles qu’énoncées dans divers documents. Le mandat fourni était substantiel, reflétant l’ampleur et la gravité des violations et abus allégués des droits de l’homme.

Il ressort clairement du rapport que nous avions raison d’être inquiets. Le rapport s’appuie sur une analyse approfondie de la législation de la Fédération de Russie, une vaste documentation, notamment des décisions de la Cour européenne des droits de l’homme, des avis de la Commission de Venise, des déclarations d’institutions autonomes de l’OSCE et d’autres organisations internationales, ainsi que des rapports et des témoignages. par la société civile. En ce qui concerne les changements législatifs dans les domaines de la liberté d’association, de la liberté d’expression et de la liberté de réunion pacifique, le rapport conclut : « La législation russe est obsédée par la restriction de ces droits de plus en plus. […] La législation russe dans ce domaine est manifestement incompatible avec l’État de droit. Au contraire, la multitude de dispositions détaillées donne aux autorités de larges pouvoirs discrétionnaires et constitue ainsi le fondement de l’arbitraire. Le rapport poursuit en faisant la lumière sur la corrélation entre les manifestations pacifiques et la législation répressive : « Chaque fois qu’il y a eu des manifestations de masse […]de nouvelles lois restrictives ont suivi.

Le rapport nous donne quelques réponses sur les raisons pour lesquelles la Fédération de Russie réprime les droits de l’homme et les libertés fondamentales. « En fin de compte, il s’agit d’intégrer la société civile dans la verticale du pouvoir. »

Faire taire la société civile place les autorités russes dans une position où elles se considèrent libres de répondre aux citoyens. De plus, avec sa répression des droits de l’homme et des libertés fondamentales, la Fédération de Russie a contribué à préparer le terrain pour sa guerre d’agression contre l’Ukraine. Le rapport expose la pensée du gouvernement russe : « des mesures restrictives sont jugées nécessaires pour ne pas être dérangé pendant la préparation de la guerre ou après qu’elle a commencé. Cela explique la vague de mesures répressives en Russie juste avant, mais surtout après le 24 février 2022. »

Monsieur le Président, le gouvernement et l’administration russes non seulement limitent excessivement les droits de l’homme et les libertés fondamentales, mais travaillent activement à leur détriment pour propager la guerre. Dans ce contexte, le rapport analyse les discours prononcés par le président Poutine qui qualifient la société civile de « cinquième colonne » et déshumanisent ceux qui sont considérés comme des ennemis, révélant ainsi « une attitude de haine profonde ».

Le rapport cite également plusieurs exemples étonnants de pression dans la formation de l’opinion, par exemple envers les étudiants et les artistes, et de violence excessive contre des militants critiques de la société civile, des journalistes et d’autres acteurs des médias, comme le cas de Grigory Yudin, politologue et sociologue. « Le 24 février 2022, il a été arrêté lors d’une manifestation contre la guerre à Moscou et roué de coups dans un fourgon de police, jusqu’à ce qu’il perde connaissance. De nombreux autres cas ont été documentés par des organisations de défense des droits humains qui affirment que le degré de violence a considérablement augmenté – de nombreuses personnes interrogées ont établi un parallèle avec la répression violente des manifestations en Biélorussie.

Toutes les violences ne sont pas commises par des représentants de l’État, souligne le rapport, mais il poursuit en déclarant que «[t]L’État russe soutient implicitement cette évolution par son manque de protection et son inefficacité dans les affaires liées à la liberté d’expression.

La liberté d’expression est aussi particulièrement affectée par la guerre. « Surtout l’extension de l’espionnage […] et donc de « haute trahison » […] en dessous de […] le Code criminel […] rend impossible le travail journalistique pendant la guerre en cours de la Fédération de Russie contre l’Ukraine.

Il est important de noter que le rapport met en lumière les ramifications spécifiques pour les femmes et les membres de la communauté LGBTQI+. Par exemple, le rapport décrit la violence sexiste contre les manifestantes. Les femmes « sont dans une position particulièrement vulnérable, surtout si elles sont détenues seules. La violence sexualisée est un phénomène relativement nouveau, plus perceptible depuis février 2022. »

Monsieur le Président, chers collègues, « la répression à l’intérieur et la guerre à l’extérieur sont reliées l’une à l’autre comme dans un tube communicant ». Puisse cette conclusion du rapport être une leçon et un avertissement pour nous tous. C’est un rappel opportun de l’une des pierres angulaires de l’Acte final d’Helsinki de 1975 sur la portée universelle des droits de l’homme et des libertés fondamentales, dont le respect est un facteur essentiel pour la paix, la justice et le bien-être. Ce qui est en jeu n’est rien de moins que le concept de sécurité globale de l’OSCE. Il est de notre devoir commun de bien défendre les valeurs et les principes de cette organisation.

Une fois de plus, j’offre nos sincères remerciements au professeur Nußberger.

Merci.

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